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Les créations des artistes pop art sont-elles faites à la gloire de la société de consommation ?


1. La perception anti-consumériste par la majorité du public


Il n'y a pas de message caché dans une œ,uvre pop art. Selon Barthes, on projette sur l'œuvre le sens qu'elle nous procure. Autrement dit, le public voit des représentations de la culture de masse, et y voit soit une glorification, soit une critique négative.

2. L'utilisation de la société de consommation par les artistes



2.1. Andy Warhol et la mécanisation

Extrait de La peinture américaine, G Boudaille et P. Javault, Nathan, 1992, sauf images et légendes.

Il peut être perçu comme un cynique aux préoccupations mercantiles. Il déclarait vouloir être une machine.

Il débute sa carrière en tant que publicitaire puis travaille dans la mode jusqu’aux années 1960. Il se met à peindre en utilisant lui aussi des images tirées de la publicité ou de la BD. En 1962, il adopte une technique de sérigraphie directement empruntée au milieu de l’impression publicitaire. Il reproduit des photos de magazines, des affiches, des pubs, etc. Ex : Campbell’s Soup, Marilyn.

Il réalise des séries d’images reproduites mécaniquement, développant ainsi une nouvelle forme de réalisme, un reflet objectif de la réalité du monde moderne où l’on consomme toutes sortes d’images et de signes, dont les œuvres d’art font partie. La technique est, en soi, un élément de revendication et une remise en cause de l’œuvre d’art comme objet unique. Ses sujets ne visent pas une critique de la société de consommation. La technique choisie volontairement objective permet à l’artiste de ne pas avoir à toucher son œuvre pour la réaliser marque une véritable distance avec la conception commune de l’art. Cette objectivité est un refus de prendre parti, comme un refus d’expression. L’œuvre devient une sorte de miroir qui, par son statut (œuvre d’art), son emplacement (musée, galerie, collection) ou le nom de son auteur, magnifie les images banales de la réalité pour en faire des images.

Cependant, ce monde peint de couleurs pétantes, d’apparence superficielle est aussi fait d’inquiétude et de pessimisme. Lorsqu’il réalise Marilyn, celle ci vient juste de mourir et son image a été reproduite par million dans le monde entier. Il reproduit de nombreux accidents, des suicides, des chaises électriques et d’autres images de ce genre pour rappeler cette tendance à la banalisation d’images choquantes, des effets de la TV et de la presse qui diffusent de la même manière -donc mettent sur un même plan- les images de publicité et ces évènements tragiques. Il met en avant le fait que la répétition d’une même image, lui fait perdre une partie de son impact émotionnel. Et à ce titre, il préfère un "banal" accident de voiture aux grandes catastrophes de l’époque.

Le pop art est lié à la culture de masse et la manière de la diffuser. En répétant un accident plusieurs fois dans une œuvre, il le banalise visuellement, pour mieux dénoncer cette banalisation par les médias, vecteurs de la culture de masse. La recherche de l’esthétisme dans le quotidien s’oppose à la banalisation. Mais le pop art n’étant pas, par déinition, une critique de la société de consommation (autant des biens que des images), l’artiste regrette une conséquence de la société de consommation, mais pas la société de consommation elle-même.


2.2. Roy Lichtenstein et la diffusion de l’information

Dans une société où l’on consomme de l’information quotidiennement et en grande quantité, Roy Lichtenstein s’intéresse aux BD. Il voit dans leurs images un moyen génial de rendre facilement accessible à tous l’information (passions, sens, objets...) et cela bien plus énergiquement que l’expressionnisme abstrait, qui devient classique avec le temps. C’est en ce sens qu’il peint Whaam ! en 1963, un agrandissement d’une case qui lui avait plu. Le nom de la peinture est une référence au contenu mais plus largement à l’univers de la bande dessinée.

Tandis que Warhol s’était intéressé à une conséquence de la société de consommation, Lichtenstein s’est intéressé à un moyen de diffusion de celle-ci. En effet, la bande dessinée, malgré la diversité des genres, est un concept de diffusion de l’information, qui s’intègre dans la culture de masse par son succès.

Lichtenstein ne cherche pas à renverser la société de consommation. Il utilise des motifs de BD des motifs qui n’expriment pas seulement une idée. Il ne choisit pas des motifs aux déclarations fracassantes, mais plutôt ceux qui n'en contienne aucun de significative. Il se sert des aspects de la culture américaine pour la peinture, qui est son intérêt. Roy Lichtenstein pense que "L'art ne transforme pas. Il formule."


2.3. Jasper Johns et la banalisation

Jasper Johns stigmatise lui aussi l’insignifiance accordée aux objets de la vie courante, avec, à partir de 1960, une série de sculptures représentant des objets ordinaires, comme des ampoules électriques ou des boîtes de bière, en bronze peint. Notons au passage que le pop art n’est pas limité aux collages et dessins. Il était particulièrement influencé par Marcel Duchamp, et ses sculptures se rapprochent du ready-made. Certains le classent comme neo-dadaïste.

Ale Cans et pinceaux, Jasper, 1964

Pinceaux en bronze, 1960 et Ale Cans en bronze peint, 1964, Jasper Johns,
collection inconnue.



2.4. Claes Oldenburg et la taille des objets

Les créations de Claes Oldenburg illustrent l’inconstance et la vulgarité (au sens de "populaire", "commun") des valeurs de la vie américaine. Il travaille sur la nourriture pour se rapprocher de la rue. Il crée notamment ce hamburger géant, posé à même le sol, en 1962 :

Floor Burger

Claes Oldenburg, Floor Burger 1962, toile rempli de mousse de caoutchouc et de
boîtes en carton, peinture au latex et Liquitex
Art Gallery of Ontario, Toronto

Entre 1969 et 1970, il fabrique un sac à glace géant.

Sac à glace de Claes Oldenburg

Claes Oldenburg, Sac à glace géant, 1969-1970, Vinyle, Acier, Moteur, Souffleurs, Fibre de verre, Laque,
6 m x 6 m x 6 m conservé au MNAM (Paris)

Il a toujours été amateur de grandes œuvres d’art. C’est à lui que l’on doit la bicyclette ensevelie du parc de la Vilette à Paris. Par ces grandes dimensions, il cherchait à proposer une version grotesque de l'objet agrandi.


2.5. Tom Wesselmann et la représentation des corps féminins

En droite ligne du collage de Hamilton (I Was a Rich Man’s Plaything), Tom Wesselmann joue sur l’idéalisation physique de la femme. Les représentations sont toujours chargées d’érotisme.

Les pointes des seins, les hanches et les poils pubiens sont toujours dans ses œuvres particulièrement mis en évidence, les traits des visages, hormis les lèvres, sont presque toujours absents.

Les personnages n’ont généralement pas de personnalité. Ils sont pâles, et entourés d’objets colorés renforçant le contraste. Ils sont en position de faiblesse dans le tableau. On voit que l’œuvre répond à l’idéal masculin de l’époque (d’aujourd’hui encore ?) de la femme.


Great American Nude n°54, Tom Wesselmann, 1964

Great American Nude n°54, 1964,
Whitney Museum of American Art, New York

Ses œuvres ont souvent dérangé, à cause de leur érotisme prononcé.



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